Il est jeune, dynamique et talentueux. Depuis sa formation dans le domaine du cinéma, le réalisateur béninois Arcade Assogba nourrit de grandes ambitions pour le 7ème art. Il vient de signer son premier long métrage intitulé ‘’L’argile’’. Un film écrit et produit par un autre réalisateur béninois Jean Odoutan. Arcade Assogba nous parle dans cette interview de son nouveau film.
Vous vous apprêtez à sortir un film, un long métrage. De quoi s’agit-il ?
C’est un film qui s’intitule ‘’L’argile’’ qui parle de cette matière qui peut aider à sculpter, à donner forme par addition ou par soustraction à une sculpture, quelque chose de modelable, cela n’est que le titre. L’argile dans le film est un lieu, un secteur imaginaire que nous avons essayé de penser dans la ville de Ouidah au Bénin. Le scénario du film est écrit par un grand cinéaste béninois du nom de Jean Odoutan. Lui-même étant un grand réalisateur de cinéma a cru en moi, en mes capacité et m’a confié la réalisation de ce long métrage qui a pour titre ‘’L’argile’’. Un jour, il m’a dit qu’il a écrit un certain nombre de scénarios et que si je suis d’accord pour réaliser un long métrage, nous allons nous y mettre pour sortir le film. Pendant nos activités sportives à Ouidah, nous échangions beaucoup sur les différents aspects du film et nous découvrions les lieux où nous pourrions tourner les différentes scènes du film. Jean Odoutan s’était résolument mis au travail pour écrire tout le scénario du film ‘’L’argile’’ en 2014. Avec nos maigres moyens financiers, nous avons pu tourner le film de bout en bout. Tous ceux qui sont intervenus dans la réalisation de ce film nous ont facilité la tâche en évitant d’être exigeants. Chacun a donné le meilleur de lui-même pour aboutir à ce résultat. Je ne cesse de les remercier du fond de mon cœur pour le sacrifice consenti.
Quelle est l’histoire que raconte le film ‘’L’argile’’ ?
C’est un film familial qui parle du retour des cerveaux. Avant, on parlait de la fuite des cerveaux. Aujourd’hui, on assiste de plus en plus au retour des cerveaux en Afrique parce que les enfants de l’Afrique qui ont migré vers l’Occident se rendent compte qu’il fait mieux vivre en Afrique qu’ailleurs hors du continent. Mon film parle du retour des cerveaux en Afrique. C’est l’histoire d’un monsieur qui est allé en Europe et il est revenu en Afrique pour développer un projet de cinéma. Il voulait faire ce retour avec sa femme européenne, mais celle-ci s’y oppose. Après son retour en Afrique, il découvre les joies et les difficultés de son continent tant chéri. Parviendra-t-il à s’en sortir ? Vous découvrirez la réponse en regardant le film ‘’L’argile’’ dans les salles de cinéma.
Quels sont les acteurs qui figurent dans ce film ?
Tout d’abord, il faut dire que le film a été tourné à 100 % par les Béninois. C’est un film qui brasse tous les acteurs majeurs du cinéma béninois. Nous avons Jean Odoutan lui-même qui est à l’affiche, Nathalie HOUNVO YEKPE, elle a l’art de faire ressortir les textes, James Salanon, Akanla Akambi, Carole Lokossou, Didier Nassègandé, Kokou Yémandjè etc. Il y a aussi des comédiens qu’on ne voyait pas à l’écran, mais qui ont aussi tenu des rôles dans ce film. Il s’agit du musicologue Marcel Kpadé, du professeur Roger Gbégnonvi qui joue aussi un rôle important etc. Nous avons également des personnages de Ouidah qui ont apporté leur contribution à la réussite de cette œuvre.
Quelles ont été les difficultés rencontrées lors du tournage de ce film ?
On m’a appris à l’école de cinéma qu’un réalisateur ne doit pas s’étaler sur les difficultés rencontrées lors d’un tournage. Mais moi, je vous dirai que le tournage de ‘’L’argile’’ a été très difficile. C’est un film qui m’a totalement épuisé, je manquais même de force physique pour mouvoir mes membres. J’étais complètement fini. Mais à la fin, je me rends compte j’ai réussi une œuvre titanesque.
Etes-vous fier de ce film ?
J’en suis très fier pour le travail accompli. Je ne suis pas seulement fier de ce qui est mis à l’écran. Je suis encore plus fier de tout ce qui n’est pas à l’écran. Comme on le dit dans le cinéma, l’essentiel n’est pas à l’écran. C’est valable pour l’histoire qui est porté, c’est valable aussi pour l’acte de fabriquer un film. C’est ce que ‘’L’argile’’ m’a appris. Grâce à la culture et à la volonté de faire les choses, beaucoup de Béninois ont accepté volontiers de se donner la main sans attendre quelque chose en retour. C’est génial. Ce sont des relations inouïes que nous avons créées. Chacun de nous a été impacté par cet acte courageux que nous avons posé à Ouidah grâce à Jean Odoutan, Ousmane Alédji, Camille Amouro qui n’est plus parmi nous aujourd’hui, Akanla Akambi etc.
Quel avenir réservez-vous à ce film maintenant ?
Malheureusement, il y a une catégorie de créateurs comme nous autres qui nous sommes positionnés en Afrique dans un cinéma dit indépendant et nous devons tout faire. Ce n’est pas facile pour nous. Aujourd’hui, la plupart des festivals de cinéma vous exigent de payer avant que votre film soit projeté sur les écrans. Voilà que vous avez saigné à blanc pour faire le film et pour aller dans les festivals avec le film, il faut encore payer. L’argent intervient à tous les niveaux. Nous n’avons pas d’argent nous les jeunes cinéastes. C’est un véritable blocage pour nous. Mais nous allons utiliser le réseau d’amitié dans un certain nombre de pays africains pour positionner le film lors des festivals de cinéma. Nous mettrons tout en œuvre pour que le film soit vu un peu partout en Afrique et même au-delà. Il sera projeté à Ouidah, à Cotonou et dans plusieurs régions du Bénin avant de parcourir le reste du monde.
Quel est votre mot de la fin ?
Je voudrais demander à tous les Béninois de croire en notre culture. Il y a une phrase qui revient régulièrement dans le film « Demain, c’est aujourd’hui ». Donc, ceux qui ont réalisé les plus grandes œuvres se sont levés un jour et ont imaginé la fin. Mais ils n’ont pas attendu demain pour le faire. Au travail. Donnons-nous la main pour construire le Bénin et l’Afrique.
Propos recueillis par Jean-Discipline Adjomassokou