La commune de Grand-Popo située à plus de 80 km de Cotonou au sud-ouest du Bénin accueille depuis plus d’une vingtaine d’années le Centre culturel finno-ouest africain encore appelé la Villa Karo. Initiée par la Finlande, cette institution culturelle, unique dans la région ouest africaine, facilite la création et l’animation de l’art et la culture et constitue la seule ouverture de la Finlande sur le monde. Son directeur général, Richard Tandjoma, nous explique dans cette interview la mission et les activités de cet établissement culturel.
Qu’est-ce qui a motivé les Finlandais à créer ce centre culturel à Grand Popo ?
Je dirai que le fondateur du Centre culturel finno-ouest africain (Villa Karo), Julia Vakkuri, un Finlandais, avait fait le tour de l’Afrique et il était fasciné par la plage de Grand-Popo. Il découvre ce bâtiment qui était une auberge dirigée par Guy Catherine. Il lui explique qu’il veut réaliser le rêve le plus fou de sa vie, celui de créer le premier centre culturel finlandais en Afrique. Guy Catherine épouse l’idée et avec le soutien du chef de la circonscription de Grand-Popo d’alors, Alain Boglé, le projet avait été accepté. Le site était le premier hôpital du Dahomey et tombé en ruine plus tard. De retour en Finlande, Julia Vakkuri rassemble tous ses amis en leur demandant de le soutenir à réaliser ce projet. L’objectif poursuivi par l’initiateur de ce centre culturel est de permettre aux Finlandais de sortir de leur pays pour découvrir d’autres contrées du monde notamment l’Afrique. Ce centre culturel permet aujourd’hui une ouverture de la Finlande sur le monde car dans le passé, les Finlandais ne sortaient pas de leur pays. Cette institution a vu le jour le 14 mai 2000. Le nom Villa Karo est venu du fait que Karo, le fils du fondateur de ce centre est décédé le jour de son inauguration.
Quelles sont les activités que vous animez dans ce centre culturel ?
Tout d’abord, nous animons les activités artistiques et culturelles. Nous organisons aussi des résidences d’artistes toutes catégories confondues, une rencontre d’échanges et de création des œuvres d’art par les artistes. Nous initions pratiquement chaque deux ou trois mois des expositions d’œuvres d’art. Il y a aussi des spectacles de musique, de danse, de théâtre, d’humour etc. Nous avons deux musées, le grand musée Karo et le petit musée dénommé le musée Mami Wata. Ce dernier regorge des œuvres de Mami Wata rapatriées au Centre culturel bien avant l’appel du président français Emmanuel Macron sur la restitution des biens culturels de la France. Les vendredis soirs sont des moments réservés à la projection des films africains et du monde. Nous disposons d’un grand espace ouvert sur la mer dédié aux arts de scène et d’une bibliothèque pour la lecture et les recherches. Nous initions des activités à l’endroit des jeunes des écoles de la place et d’ailleurs dans le but de détecter des talents qui se cachent en eux. Nous avons le point de lecture au cours duquel un livre au programme scolaire est étudié dans l’intérêt des élèves pour permettre à ces derniers d’avoir une passion pour la lecture. Une fois par mois, nous invitons un auteur d’un livre qui échange avec le public sur le contenu de son ouvrage.
Quels sont les publics qui s’intéressent aux activités du Centre culturel finno-ouest africain ?
Tous les publics viennent à la Villa Karo. L’ancienne et la jeune génération participent à nos activités. Nous accueillons aussi bien les nationaux que les étrangers dans notre centre culturel. Nous développons aussi une stratégie pour convoyer les filles et les femmes à venir participer aux activités à la Villa Karo. Le résultat est très encourageant. En réalité, nous enregistrons au minimum dix mille (10 000) visiteurs chaque année. La participation à nos activités est libre est gratuite.
Quelle est la collaboration aujourd’hui entre les artistes finlandais et les artistes béninois ?
Il existe une parfaite collaboration entre les artistes des deux pays. A la Villa Karo, nous servons de pont entre les artistes finlandais et les artistes africains, un lieu où les artistes africains et finlandais se rencontrent pour créer l’art. Aujourd’hui, je dirai avec fierté que nous avons réussi à réaliser ce rêve. C’est le cas de l’artiste béninois Noel Saizonou qui, grâce à la Villa Karo, est allé en Finlande où il a créé un groupe musical pour faire connaitre la culture africaine. Ce groupe est en ce moment en tournée européenne.
Quel est votre rêve pour le Centre culturel finno-ouest africain Villa Karo?
En tant que directeur général, j’ai un grand rêve. Chaque année, nous recevons une quarantaine d’artistes en activité à la Villa Karo. Malheureusement, nous n’accueillons souvent que cinq (05) artistes béninois. Mon ambition est de recevoir vingt (20) artistes béninois et africains et vingt (20) artistes finlandais qui seront en résidence ici pour créer l’art. Ce rêve ne peut se réaliser sans un financement béninois et africain. Nous obtenons un financement du ministère finlandais de l’éducation qui est en charge de la culture. Ce fonds est destiné à soutenir les artistes finlandais en résidence à la Villa Karo. Les amis de la Villa Karo y contribuent aussi pour initier les activités au profit des artistes béninois et africains. Cela ne suffit toujours pas à réaliser nos ambitions. Nous souhaiterions avoir un financement béninois et africain pour continuer à soutenir les artistes. Je demanderais aux bonnes volontés et au gouvernement béninois d’avoir un regard bienveillant à notre égard pour maintenir notre existence car la Villa Karo est unique en Afrique et dans le monde. Soutenir le Centre culturel finno-ouest africain ne fera que grandir le Bénin, l’Afrique, l’art et la culture dans le monde.
Propos recueillis par Jean-Discipline Adjomassokou
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