Charly Djikou est un artiste sculpteur béninois hors du commun. Il sculpte sur pierre qui est sa matière première. L’exposition de ses œuvres dénommée « K’art Djogbé » est toujours une réelle curiosité pour tous les visiteurs.
On se croirait au Paléolithique inférieur où les outils lithiques étaient épais, lourds, rugueux et difficiles à manipuler. Cependant, Charly Djikou, artiste sculpteur contemporain audacieux a fait recours à ce matériau de la préhistoire pour pratiquer son art. Contrairement au lambda, Charly Djikou voit la pierre d’un autre œil. Selon lui, « La pierre n’est pas rigide, elle est plutôt une force, d’où la nécessité de l’observer, de l’écouter, mais surtout de l’accepter pour finalement la sculpter ».
Près d’une vingtaine d’œuvres sculptées sur de la pierre accueillent les visiteurs. Sur un écran installé à l’occasion, un film documentaire réalisé sur le parcours de l’artiste renseigne du coup les plus curieux. Disposée tantôt de manière isolée et tantôt groupée, la scénographie adoptée par les organisateurs de cette exposition offre une observation aisée tout autour des œuvres de l’artiste. De plus, l’éclairage doré projeté sur les œuvres montre aux visiteurs les moindres détails sur la texture et la morphologie des sculptures exposées. Parmi les œuvres de l’artistes, on peut distinguer : Anagonou, un visage taillé sur du marbre, Guèlèdè Houindo, ensemble, tous deux sur du granite, etc.
Le contact qui saute rapidement à l’œil du visiteur est que l’homme est la caractéristique fondamentale des œuvres de Charly Djikou. Les visages et les noms attribués à ces œuvres évoquent l’amour entre les êtres humains. Marion Hamard, directrice de l’espace culturel ‘’Le Centre’’ explique le sens des œuvres de l’artiste Charly Djikou « A travers ces visages, il y déploie son horizon philosophique et ses réflexions autour du vivre ensemble : l’amour, la paix, l’identité, la conscience de l’être humain ». « Il affirme le besoin de vivre dans le respect de la nature et de son environnement, dans le respect de l’autre à une époque où la modernisation a tendance à fragiliser l’harmonie entre l’Humain et la Terre, entre l’Homme et ses pairs », a-t-elle ajouté.
Des pierres pour réaliser les œuvres de Charly Djikou
Le Bénin dispose du granite dans plusieurs régions du pays notamment à Dassa Zoumé, à Dan, à Savalou, etc. Il existe également au Bénin et plus précisément à Lanta dans la commune de Djidja, le marbre blanc qui est très recherché dans le monde. L’abondance variée de cette matière au Bénin constitue pour l’artiste une opportunité inestimable d’aborder à travers son art les cultures de son pays : « J’ai découvert la pierre sur la terre béninoise et je vois en cela une assurance terrible. Cette matière me donne une fierté d’écrire mon histoire, l’histoire de mon peuple et celle du continent africain». Pour la conception de ses œuvres, Charly Djikou utilise des instruments variés comme le marteau, le burin, la meule électrique et des dispositifs de protection contre le bruit, la poussière, etc.
Âgé de 46 ans, Charly Djikou a connu une enfance difficile. Malgré qu’il n’ait pas franchi le cap du collège, Charly Djikou reste fier de son art : « D’ici à mille an, on continuera à parler de moi d’autant plus que déjà de mon vivant, on étudie mes œuvres dans les universités », a-t-il fait savoir. Loin d’avoir l’intention de rester le pionnier des artistes contemporains de la sculpture sur pierre au Bénin, Charly Djikou déclare sa disponibilité à partager ses connaissances à tous ceux qui nourrissent l’ambition d’apprendre ce métier.
Hubert KIDJASSOU