Deux mois après la levée du cordon sanitaire, les bus ne circulent toujours pas en plein régime. Les passagers sont de plus en plus rares du fait de la hausse des tarifs du transport en commun. Pire, les pouvoirs publics exigent la limitation du nombre de passagers par voyage.
Moins de dix (10) personnes à bord, lieu d’embarquement clairsemé, quelques vendeuses déambulent dans le bus pour libérer leurs articles aux passagers. C’est l’aspect que présente le parc d’embarquement de « Groupement des Compagnies de Transports par Autocars (GIE-GCTA) au quartier Sikècodji à Cotonou.
Approchés sur la question des difficultés, les acteurs se désolent. Florence Gbèyéton, une passagère vêtue en pagne cousu confirme. « C’est vrai, les responsables ont augmenté les tarifs mais nous ne pouvons rien quand il est nécessaire de voyager ». « Nous avons l’habitude de prendre les bus à cinq mille francs (5000 F CFA). De là, nous nous sommes retrouvés à sept mille francs (7000 F CFA) et ils nous prennent à l’heure actuelle neuf mille francs (9000 F CFA) ».
Pour Joël Sohou Mahugnon, un conducteur de bus, c’est le ravage de la maladie qui entraine cette situation aussi bien pour les conducteurs que pour les voyageurs. « Il est très difficile aujourd’hui pour les passagers de prendre les bus. Car il revient à chacun d’eux de payer deux places pour respecter la mesure de distanciation physique d’un mètre exigée ; au risque d’être contaminé », a-t-il expliqué. « Ce qui n’arrange pas toujours, poursuit-il, puisque ces deux places faisaient onze mille francs (11000 FCFA) au moins et pour leur permettre de payer celles-ci, nous leur avons fait une réduction de deux mille francs (2000 F CFA) », a-t-il souligné.
Derrière Joël, Solange Hinvi, du haut de ses cinquante (50) ans, s’exprime en ces termes : « Nous souffrons trop et nous n’avons personne à qui nous confié ». Pour cette vendeuse de fruits, les difficultés sont atroces et les usagers du parc sont parfois emportés par le découragement. « Nous ne vendons plus comme auparavant. Ces fruits font plus d’une semaine sans être vendus. Or, nous ne vivons qu’au quotidien ». À côté de cette dernière, Jacqueline Adanmazè, la doyenne du parc automobile, se confie toute en sueur très déçue. « Ça fait vraiment pitié, nous n’avons aucun autre endroit où vendre nos produits si ce n’est ici où nous vendons depuis des années. Mais nous n’avons jamais vécu une telle situation qui nous contraint à rentrer presque tous les jours bredouille, et grave on ne sait quand ça finira ».
Les usagers ne savent plus à quel Saint se vouer
« L’augmentation du tarif est générale, le commerce n’est pas de la loterie, nous avons fait des prêts à la banque pour dynamiser nos activités et nous devons payer à bonne date ».C’est par ces propos que Francis Fiogbé s’explique. « Les tarifs ont été multipliés presque par deux en raison de la baisse du nombre de passagers ». Pour lui, les gens voyageaient beaucoup plus que cela par le passé, mais aujourd’hui, il faut vraiment avoir une urgence avant d’effectuer un voyage. Ce phénomène est général à cause de la peur de sortir sain et de revenir avec la maladie. Le second facteur est le problème financier que tout le monde connait en ce moment de la pandémie. « Nous ne pouvons rien d’autre pour nos clients », poursuit-il. « Nous avons gardé le même flux, le même rythme et nous effectuons un seul voyage par jour. C’est donc un problème planétaire, mais nous n’avons licencié personne jusque-là puisqu’il n’y a que des pères et mères de famille en notre sein », avoue le chef parc.
Selon Francis Fiogbé, ce serait très gauche de passer au licenciement de leur personnel qui n’est même pas responsable de la situation que le monde traverse actuellement. D’où la décision de garder tout le staff. À en croire ce responsable préoccupé par la résolution du problème, il faut se faire un bénéfice pour quand même subvenir aux besoins de la famille. Il n’a pas manqué de demander à tous leurs fidèles clients de les comprendre et de les aider à atteindre leurs objectifs. Francis souhaite rentrer en possession des subventions annoncées par l’État le plus tôt possible avant de lancer ses remerciements à l’endroit des autorités étatiques pour leur sens de responsabilité.
Jean-Didier Essèka