Le port de pêche de Cotonou ne connait plus la même animation comme auparavant. La raison est que les pêcheurs n’arrivent plus à capturer des poissons en quantité pour satisfaire leurs clients. Ils accusent les pêcheurs des eaux continentales de pratiques illégales qui appauvrissent la mer.
«Avant, j’attrapais presque toutes les catégories de poissons, mais aujourd’hui, nous ne trouvons plus grand-chose dans la mer ; c’est seulement de la promenade que nous faisons. Nous nous endettons pour acheter le carburant dans le moteur de nos barques et pour la restauration. En retour, rien et nos créanciers nous poursuivent, nous perdons le sommeil», a expliqué avec regret Victorin Agbo, un pêcheur expérimenté du port de pêche de Cotonou. Ces mots sont sur les lèvres de tous les pêcheurs artisanaux marins. Ils n’arrivent plus à subvenir à leurs besoins quotidiens. « La pêche, c’est notre métier. Mais, nous ne parvenons plus à faire face à nos problèmes avec le gain de la pêche. Nous ne savons plus quoi faire », a fait savoir Raymond Branco, pêcheur. Le site de vente de poissons du port de pêche est clairsemé. Il y a désormais moins de vendeuses de poissons et moins de clients. « Moi, j’achète souvent les poissons bars ici. Ils deviennent rares. Je n’en ai pas trouvé aujourd’hui », a déclaré Léontine Atchodé, une cliente. Effectivement, les pêcheurs ne capturent plus plusieurs espèces de poissons dans la mer béninoise. C’est le cas des mâchoirons, les sardinelles et les bars bossus etc. « Les bars et les sardinelles rondes ont presque tous disparus, mais viennent sporadiquement », déplore Etienne Amoussou, l’un des pêcheurs des lieux. Les pêcheurs pointent un doigt accusateur sur leurs collègues de la pêche continentale qui sont venus envahir leur secteur avec objets illégaux qui empêchent le développement de la pêche.
L’usage des techniques de pêche prohibées nuit au secteur
Parmi les 08 techniques de pêche autorisées, la pêche à la ligne est la plus recommandées parce qu’elle permet de capturer plus facilement les gros poissons en laissant vivre les petits poissons. Il y a aussi le filet maillant de fond à grande maille de 35 mm appelé ‘’Tohounga’’ sans oublier le filet maillant de fond à petites mailles de 20 mm appelé ‘’Sovi’’. Ces filets permettent de pêcher les bars et les sardinelles. Malheureusement, les pêcheurs des eaux continentales utilisent d’autres filets prohibés qui ramassent toutes les espèces de poissons (petits et gros). Ainsi, les poissons ont du mal à se reproduire dans la mer. Les pêcheurs artisanaux marins, lorsqu’ils se rendent à la pêche, ne trouvent plus rien. D’où l’origine de la rareté des poissons. Malgré les multiples séances de sensibilisation, la pratique continue. Or, les pêcheurs font d’énormes investissements pour mener à bien leurs activités. Les barques, les filets et les moteurs proviennent pour la plupart au Ghana et les coûts sont souvent excessifs. Le prix du moteur varie selon la catégorie. Il va d’un million quatre cents francs (1 400 000 FCFA) à plus de deux millions de francs (2000 000 FCFA).
Aujourd’hui, le port de pêche de Cotonou enregistre plus de 5 000 pêcheurs. Ces derniers ne pensent pas que la reconversion dans d’autres métiers sera la solution pour résoudre le problème de la rareté des poissons. Pour eux, les pêcheurs des eaux continentales doivent mettre fin aux pratiques malsaines qui conduisent à l’appauvrissement de la mer en poissons, car les poissons ont besoin de se reproduire et on ne peut pas continuer à braver les interdit et espérer un mieux-être dans le secteur.
Jean-Didier Essèka